Le cadre juridique du mandat signé entre une banque et un IOBSP
Une décision de justice de la Cour d’appel de Colmar (17 juillet 2024, n° 23/00835) vient donner un éclairage sur cette question relative à la nature juridique du mandat entre la banque et l’IOBSP.
Synthèse de la décision
Dans l’affaire jugée par la Cour d’appel de Colmar le 17 juillet 2024, un emprunteur en difficulté financière assigne à la fois la banque prêteuse et l’intermédiaire en opérations de banque (IOBSP) ayant présenté l’opération, afin d’engager leur responsabilité civile.
L’emprunteur avait contracté deux prêts in fine (en 2003 et 2007), prorogés jusqu’en 2024 et 2027. Il reprochait :
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à la banque, une faute de son mandataire (l’IOBSP) ;
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à la banque encore, un défaut d’obligation de mise en garde ;
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à l’intermédiaire, une responsabilité personnelle dans la réalisation de l’opération.
Décisions de la Cour d’appel de Colmar
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Sur la nature du mandat entre la banque et l’intermédiaire :
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La Cour estime que le mandat mentionné à l’article L.519-2 du Code monétaire et financier ne relève pas du mandat civil classique tel que défini aux articles 1984 et suivants du Code civil.
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Elle juge qu’il ne peut être assimilé ni à un mandat civil, ni à un mandat d’intérêt commun (exclu par un précédent arrêt de la Cour de cassation, Com., 8 juillet 2008, n° 07-12759).
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Cette distinction conduit la Cour à écarter la responsabilité de la banque vis-à-vis des actes de l’intermédiaire, faute de lien de représentation visible ou de mandat civil avéré.
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Sur la responsabilité de l’intermédiaire :
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L’emprunteur échoue à démontrer un lien de causalité entre la faute alléguée de l’IOBSP et son préjudice.
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La Cour rejette donc également sa demande à l’encontre de l’intermédiaire.
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Sur l’obligation de mise en garde du prêteur :
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La Cour infirme le jugement de première instance qui avait retenu la banque responsable de ce chef.
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Elle considère que tant que les prêts ne sont pas arrivés à échéance, aucun dommage réparable ne peut être retenu à ce stade.
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Elle écarte par ailleurs toute obligation de conseil du prêteur, réaffirmant un principe constant du droit bancaire.
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Commentaire juridique
Cet arrêt de la Cour d’appel de Colmar soulève plusieurs points clés concernant l’encadrement juridique de l’activité d’intermédiation bancaire :
1. La qualification du mandat en question
La Cour d’appel propose une lecture contestable du mandat IOBSP en excluant toute référence au mandat civil, alors même que le droit français ne reconnaît aucune autre forme de mandat autonome en dehors du Code civil.
Cette analyse, bien que motivée par des éléments factuels (notamment l’absence de mention visible de la banque dans les propositions de prêts), fragilise le fondement juridique de la représentation dans la relation banque–intermédiaire.
Cela pose un risque pour la sécurité juridique des parties, notamment des emprunteurs, qui peuvent à bon droit estimer être en relation indirecte avec la banque via son mandataire.
2. La responsabilité du mandant (la banque)
En excluant la qualification de mandat civil, la Cour écarte d’emblée la responsabilité du mandant (la banque) pour les actes de son mandataire (l’IOBSP). Or, selon la jurisprudence classique, un mandant peut être tenu responsable en cas de faute du mandataire, sauf à démontrer l’absence de lien de représentation ou l’existence d’une faute lourde (Cass. ch. mixte, 29 oct. 2021, n° 19-18.470).
Cet arrêt semble donc s’inscrire dans une logique de protection du prêteur, quitte à fragiliser la position de l’emprunteur.
3. L’enseignement pour les IOBSP
Cette affaire illustre l’importance pour les IOBSP de :
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Bien formaliser leurs mandats avec les établissements de crédit ;
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Informer clairement l’emprunteur de leur rôle de mandataire et des établissements pour lesquels ils interviennent ;
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S’assurer que les documents remis à l’emprunteur comportent la mention du mandant, afin d’éviter toute ambigüité sur l’origine de l’offre de financement.
Il est également prudent de rattacher explicitement tout mandat d’intermédiation aux règles du Code civil, pour limiter le risque de dénaturation par le juge.
Ce qu’il faut retenir sur la nature juridique du mandat entre la banque et l’IOBSP
Cet arrêt de la Cour d’appel de Colmar, bien que relativement isolé, pourrait être invoqué dans d’autres contentieux pour écarter la responsabilité des banques.
Il souligne les tensions entre la réalité contractuelle des mandats d’intermédiation et la lecture que peuvent en faire les juridictions.
Une vigilance contractuelle accrue s’impose donc à tous les professionnels IOBSP dans la rédaction et l’usage de leurs mandats.
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